Regarder l’immensité du toit amazonien assis sur une branche, sauter du sommet d’une angélique à un gonfolo, se laisser transporter par la vitesse attaché à une liane… « Pas besoin d’aller sur la Lune pour découvrir un “autre” monde », c’est ce que croit Samuel Counil, arboriste, Président de l’association Cimes à gré qui propose des animations sous et dans les arbres.
Lionel Collado est même allé jusqu’à réaliser ce monde, un rêve d’enfant : construire sa maison dans les arbres. Tout est parti d’un projet personnel, puis l’idée a germé de créer un lieu touristique dans le but de faire découvrir les sous-bois et la canopée, ce tout dernier étage de la forêt qui cherche à se faire dorer la foliole au plus près du soleil.
Depuis la fin des années 1990, l’acrobate de la biodiversité n’a jamais cessé de faire évoluer son territoire, le Camp Canopée situé à proximité du fleuve Kourou. Entre nuits à 10 m au-dessus du sol, ponts de singe, tyroliennes et descente en rappel, les amateurs de sensations fortes n’en ont pas fini de se faire des frayeurs !
Aujourd’hui limités par les moyens matériels, techniques et scientifiques, les grimpeurs voient haut et grand pour l’avenir de leur profession. D’ici une trentaine d’années, les sorties dans la nature sauvage pourront se faire à l’aide de drones ou de « dirigeables silencieux, fiables et précis » qui permettront « de naviguer sur les cimes en observant les détails, mais aussi d’assurer le transfert des touristes de canopée, sur un site équipé, par le haut ! », se prête à rêver Samuel Counil. De plus, « le système de télécommunication aura progressé de manière à faciliter logistique et sûreté éloignée », ce qui rendra les échanges beaucoup plus aisés avec les différents intervenants, « “savants” naturalistes et scientifiques, éducateurs sportifs encadrants, artistes, guides et hommes de la forêt guyanaise ».
Perchés sur des « bivouacs confortables », les aventuriers du futur passeront un week-end de verdure entre ciel et terre, éclairés par des panneaux solaires dernier cri qui se fonderont dans la masse végétale et alimenter en eau de pluie grâce un système d’irrigation par les feuilles. De leur bulbe sécurisé, ils pourront se laisser bercer par la brise, chanter avec les paypayos ou « programmer des escapades en fonction de phénomènes particuliers (floraisons, évènements faunistiques, astronomiques) », prévoit d’ores et déjà l’arboriste.
Toutefois, le respect de l’environnement reste l’ambition première des spécialistes du secteur. Constructeur mi-écolo mi-envahisseur, Lionel Collado est bien conscient qu’« en amenant des gens dans la forêt [il] l’érode ». Mais le désir de montrer que ce milieu n’est pas « que bon pour l’orpaillage, hostile, ni plein de moustiques » l’emporte. L’objectif étant donc de « limiter au maximum l’impact négatif »… naturellement !

Texte de Clara Fabre
Illustrations d’Olivier Copin  et Alex-Imé