Établie au Suriname depuis 1916, la société américaine de production d’aluminium Suralco tire sa révérence. À partir de juillet prochain, le gouvernement surinamais va reprendre la mine et la raffinerie à son compte. Certains observateurs invitent néanmoins à la prudence.

Conformément au récent accord signé entre le gouvernement surinamais et Alcoa*, société mère de Suralco basée à Pittsburg en Pennsylvanie, les opérations d’extraction et de raffinage sur le site de Paranam (Para) ainsi que la production hydroélectrique d’Afobaka (Brokopondo) seront désormais gérées par une société publique. Cette acquisition ne coûterait pas un sou à l’État surinamais, selon certaines informations.
En 1958, le géant minier américain s’est engagé auprès du gouvernement de l’époque à construire un barrage et produire de l’aluminium. En 1964, la centrale hydroélectrique d’Afobaka entre en service. Pièce maîtresse du projet, elle approvisionne la raffinerie en électricité. Et Suralco vend le surplus d’énergie au fournisseur de service public surinamais EBS (Energie Bedrijven Suriname) conformément au contrat liant les deux parties.
Pendant des années Suralco fut la principale source de revenus du Suriname, mais l’an dernier Alcoa a annoncé son intention de diminuer sa production et licencier des travailleurs dans un contexte de baisse des prix sur le marché international. Actuellement Suralco produit 876 000 tonnes d’alumine par an pour une capacité de raffinage annuelle de 2,2 millions de tonnes, mais d’ici fin avril la production va passer à 443 000 tonnes. L’usine emploie environ 700 personnes et fait vivre indirectement un bon nombre d’entreprises locales. Début mars, l’investisseur américain a décidé de réduire sur le plan mondial ses capacités de fonderie de 14% (500 000 tonnes) et ses capacités de raffinage de 19% (2,8 millions de tonnes) et d’orienter ses investissements vers l’automobile et l’aérospatiale, marchés jugés plus porteurs.

Une reprise en main dans un contexte international peu favorable
Ces derniers temps le Suriname tente de se réapproprier son industrie minière. Ainsi, depuis 2013 l’État surinamais détient 30% des parts de la mine d’or de Rosebel (Brokopondo) auparavant détenue à 95% par la société canadienne Iamgold. L’année dernière, il a également acquis une participation de 25% dans la mine d’or de Merian (Marowijne), un projet de la société américaine Newmont évalué à 1 milliard de dollars.

Si, comme le souligne Devsur, cette opération de reprise de Suralco vient conforter le sentiment national surinamais, certains économistes pensent que le gouvernement devrait y regarder de plus près. Selon Waddie Sowma, président de l’Association des économistes du Suriname (Vereniging van Economisten in Suriname), les coûts d’exploitation élevés et les maigres bénéfices réalisés sur le marché mondial ont poussé inexorablement Suralco vers la sortie. La branche aura besoin d’une injection massive de liquidités pour redémarrer, « et ça, nous ne l’avons pas  », a-t-il déclaré. Cependant, il y voit un avantage : en reprenant la main sur le barrage hydroélectrique d’Afobaka, le Suriname n’aura plus à payer les tarifs élevés facturés par Suralco pour s’approvisionner en électricité…

*Alcoa, premier producteur mondial d’aluminium primaire et d’aluminium usiné (alcoa.com/france).

Titre original  : « Suralco to become fully Surinamese » Devsur (19/03/15)
Autre titre : « Suralco se barre, il n’y a plus rien à gratter » (version sarcastique)

Source : Devsur.com, site d’information surinamais de langue anglaise.

Photos en haut et ci-dessous : le site de production ALCOA de Brokopondo en août 2012. Cliché Atelier Aymara.

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