Faute de douanes, l’ouverture sur l’Oyapock du pont qui relie la France au Brésil est encore repoussée. Pourtant l’ouvrage d’art est prêt depuis deux ans et demi.

Construit en deux ans pour un coût de 71 millions de reais*, le pont binational est emblématique de la difficulté de l’administration brésilienne à terminer ses grands chantiers à travers le pays. Ce nouveau contretemps est dû au retard pris dans la construction du bâtiment des douanes. Débuté voilà seulement quatre mois, le chantier sera livré au plus tard en novembre 2014. Il en coûtera 13,7 millions de reais aux coffres publics, mais le gouvernement d’Amapá devra encore rajouter 6 millions pour les deux kilomètres de connexion à la nationale (BR-156).

Par conséquent, l’inauguration officielle du pont en présence des deux chefs d’État Dilma Rousseff et François Hollande – le président français doit se rendre à Brasília le 12 décembre - est tombée à l’eau. Pourtant, il y a une dizaine de jours encore, le sénateur José Sarney (PMDB-AP) avait annoncé la rencontre des deux chefs d’État sur la frontière. À quelques mois des élections générales, le coup médiatique de l’ancien président a agacé le gouverneur Camilo Capiberibe (PSB) et mis le ministère des Affaires étrangères en porte-à-faux vis à vis des Français. (Cf. Brèves autour du pont)

En réaction, le gouvernement fédéral s’est empressé de construire des locaux provisoires pour un coût de 850 000 reais. Transportés par camion depuis Joinville, ville du sud brésilien située à 5 000 km des rives de l’Oyapock, des modules préfabriqués en bois et en aluminium sont actuellement en cours d’assemblage. L’acheminement du matériel a pris 12 jours car il faut compter avec la traversée du fleuve Amazone. Mais il reste un obstacle : tant que les accords bilatéraux ne seront pas signés, le pont restera fermé. C’est ce qu’a annoncé le ministère des Affaires étrangères brésilien. (Cf. Brèves autour du pont)

Pendant ce temps, sur la rive gauche guyanaise, tout est prêt…

 

Le Département national des infrastructures de transport (DNIT) attribue ces lenteurs à la difficulté de recruter les maîtres d’œuvre : par deux fois, l’appel d’offre du bâtiment des douanes n’a pas trouvé preneur ! Et c’est seulement sur invitation de Jorge Fraxe, directeur général du DNIT, que la société Paleta a finalement accepté le marché, alors qu’elle venait à peine d’achever un chantier à Teresina (Piauí). « J’ai sollicité une douzaine d’entreprises. Seule Paleta a répondu », a-t-il déclaré.

Selon Fraxe, le fait que les chantiers du pont et des douanes n’aient pas été regroupés dans le même appel d’offre explique en partie les difficultés actuelles. Avant de poursuivre : « La grève de 74 jours des agents du DNIT en juin dernier, la logistique complexe à mettre en place sur ce projet [du pont] et les précipitations abondantes dans la région n’ont en rien arrangé les choses.»

 

* 1 R$ = 0,31 €

Condensé de l’article de Mauro Zanatta paru dans le quotidien O Estado de São Paulo le 01/12/13 sous le titre « Ponte fica pronta, mas ninguém pode passar ».

Photo Guillaume Aubertin 2012