Chaque année, pendant la période de frai, les pêcheurs paraenses sont au chômage technique. La pêche artisanale responsable est un levier indispensable à la bonne gestion des ressources piscicoles en Amazonie.

Entre novembre et février, de nombreuses espèces de poissons d’eau douce entrent dans une période cruciale. À la faveur de la saison des pluies, les bancs remontent les cours d’eau à la recherche d’un bassin oxygéné et peu profond pour se reproduire. Ils deviennent alors très vulnérables. Les premiers habitants ont appelé cette période piracema, du tupi pi’ra (poisson) et ‘sema (sortir)*.
En période de frai, la pêche est strictement encadrée et réglementée au Brésil. Pour de nombreuses espèces, la capture est interdite dans tous les bassins hydrographiques du territoire. Les pêcheurs, mais aussi les entrepôts frigorifiques, poissonneries, supermarchés, restaurants et hôtels sont tenus de déclarer au ministère de l’Environnement leurs stocks de poissons frais, réfrigérés ou congelés. L’interdiction s’étend aussi aux poissons endémiques commercialisés à des fins ornementales, aux vifs ainsi qu’aux crabes et crevettes.
Ainsi, pendant quatre mois, tous les artisans pêcheurs doivent suspendre leur activité. En contrepartie, l’État brésilien leur verse une compensation financière. « Pour subvenir aux besoins des pêcheurs, le ministère du Travail et de l’Emploi (MTE) verse un salaire minimum pendant les quatre mois correspondant à la fermeture. Mais pour cela, vous devez être en règle », précise Alexandre Julião, du secrétariat du Travail, de l’Emploi et du Revenu de l’État du Pará. (O Liberal, 4/11)
Jusqu’au 17 janvier, une équipe du pôle emploi brésilien (Sine) va parcourir le vaste Pará pour recenser et ouvrir les droits des futurs bénéficiaires. Selon les estimations du MTE, sur les 277 000 pêcheurs actuellement en activité dans le Pará, environ 70 000 seront indemnisés cette année, contre 50 000 l’année dernière. Chaque allocataire touchera au total la somme de 2 712 reais, soit 900 euros.

… et des fraudeurs
Les contrevenants encourent des amendes allant de 1000 à 100 000 R$ et aussi des peines de prison. Dans les années 2000, la multiplication des pêcheurs dans la communauté paraense avait éveillé les soupçons des autorités brésiliennes. Ainsi, entre 2003 et 2010, leur nombre avait plus que triplé, passant de 40 000 à 130 000 ! (Diário do Pará, 16/05/2010)
Dans la foulée, la Police fédérale avait mis à jour dans la capitale Belém, à Santarém et sur l’île de Marajó notamment, une vaste fraude aux « allocations piracema ». Des milliers de prétendus pêcheurs profitaient de la solidarité nationale alors que nombre d’entre eux n’auraient pas su différencier un requin d’une enclume…

*Dicionário histórico das palavras de origem tupi (Antônio Geraldo da Cunha)

Photo ci-dessus et ci-dessous : la famille d’Élio pêche de père en fils, en scaphandre et grâce à un compresseur thermique, au fond du fleuve Xingu. Il remonte avec des bouteilles remplies de poissons d’aquarium qu’il revendra sur le marché de Belém. Cliché P-O Jay

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