Selon l’ex-ambassadeur guyanien en Chine, David Dabydeen*, le Guyana a tout à gagner en renforçant ses liens avec l’empire du Milieu, mais pour y arriver les médias locaux doivent cesser de « débiner les Chinois ». Extraits de l’entretien accordé au Guyana Chronicle (6/12/15).

Sur les cent millions de touristes chinois qui partent à l’étranger chaque année, nombre d’entre eux pourraient choisir les Caraïbes comme destination, notamment le Guyana, à condition d’en finir avec la « culture du dénigrement contre les Chinois. » Voilà le message fort de David Dabydeendeen, ex-ambassadeur guyanien en Chine, adressé aux médias guyaniens. « Les Chinois sont des citoyens avisés, ils sont conscients de ce qui se dit à leur encontre. Nos journaux doivent cesser de casser du Chinois , plus nous les matraquons, moins ils privilégient notre pays pour leurs vacances. Il faut en finir avec ça, nous devrions être critiques à bon escient et être solidaires de la même façon », a déclaré Dabydeen. Et de suggérer à ses congénères d’être « moins sensationnalistes, plus objectifs et justes. »
Le Guyana a été le premier pays du Commonwealth des Caraïbes à établir des relations avec la Chine en 1972, et il a toujours entretenu des relations cordiales avec cette nation. Récemment, le gouvernement guyanien l’a sollicitée sur plusieurs grands projets d’infrastructure, notamment la centrale hydroélectrique d’Amaila, le nouveau pont sur le Demerara et un port en eau profonde. « Aujourd’hui, la Chine est le seul pays disposant d’énormes réserves de liquidités pour aider les pays en voie de développement, surtout au niveau des infrastructures », a-t-il précisé.
Par le passé, la Chine a aidé le Guyana dans la construction de l’International Conference Centre à Liliendaal, l’aménagement du Grand Georgetown, le financement de ferries et aussi la formation militaire, l’assistance médicale et l’octroi de bourses. « L’aide chinoise se fait sous forme de dons ou de prêts consentis à des conditions très favorables », et représente environ 1 milliard de dollars américains. La Chine est désormais devenue « la banque du monde », supplantant l’Amérique en matière de prêts et d’aide au développement. « La Chine est très intéressée par les Caraïbes et l’Amérique latine qui lui offrent ressources minérales et produits agricoles. Elle investit également dans cette grande région au vu des perspectives économiques…»

Apprendre le mandarin
« La présence chinoise au Guyana remonte à 1840. Un grand nombre de personnalités guyaniennes sont d’origine chinoise comme l’ancien ministre des Affaires étrangères Carolyn Rodrigues-Birkett, la Première dame Sandra Granger ou encore le premier président guyanien Arthur Chung. Notre relation avec la Chine a vocation à se développer vers une plus grande coopération. » Selon Dabydeen, la communauté chinoise locale mérite la plus grande attention car elle est un pont vers la Chine. Et la Chine représente l’avenir. Dans cette optique, l’ancien ambassadeur en Chine préconise l’introduction du mandarin dans les écoles guyaniennes. « Il y a plusieurs milliers de jeunes en Angleterre, pays où je travaille actuellement, qui s’initient au mandarin. Certaines écoles l’ont choisi comme langue obligatoire. La Chine est l’avenir de l’homme, et si nous voulons jouer un rôle, nous devons être réactifs. Il ne s’agit pas de fermer les yeux sur la corruption, mais le Guyana a besoin de la Chine comme partenaire pour son développement dans les années à venir. »

* David Dabydeen, ex-ambassadeur guyanien en Chine, professeur de littérature, est actuellement en poste à l’Université de Warwick. Son rôle en Chine consistait à faire du lobbying auprès des institutions financières chinoises pour soutenir des projets de développement au Guyana.

Photo : Restaurant chinois à Georgetown – Sylvain Santelli – Août 2013

Le portfolio de Sylvain Santelli – The way we live in Georgetown