Début 2012, les Indiens Mundurucu établis dans le sud-ouest du Pará ont cédé, au prix de 120 millions U$, les droits d’une partie de leur territoire à une société irlandaise leader sur le marché du carbone. Détentrice d’une “parcelle” de forêt aussi vaste que la Bretagne, la Celestial Green (CG) compte ainsi tirer profit de la vente des crédits carbone obtenus sur une période de 30 ans. L’accord financier lui réserve également tous les droits sur la biodiversité locale. De plus il interdit aux Mundurucu d’exercer toute activité allant à l’encontre des intérêts de la société. À ce jour, trente accords de gré à gré entre acheteurs internationaux et vendeurs autochtones auraient été conclus en Amazonie. À elle-seule, la CG détiendrait pas moins de 200 000 km², soit deux fois la superficie du Portugal. À en croire son dirigeant principal, chaque contrat serait rigoureusement établi avec le consentement libre, préalable et éclairé des communautés indigènes ! Selon Márcio Meira, président de la Funai1, ces contrats ne reposent sur aucune base juridique  « Au Brésil, il n’y a pas de loi règlementant le mécanisme de réduction des émissions dues au déboisement et la dégradation de la forêt. [...] Par conséquent, les crédits de carbone proposés à la vente ne sont pas valables.» Souvent, les Indiens signent sans connaissance de cause et se retrouvent piégés, ne pouvant pas même abattre un arbre ; pis, ils font le lit de la biopiraterie. Dans le Rondônia, les Suruí ont mis un œuvre un modèle plus proche de la philosophie du sommet de la Terre de Rio 92. Ici, point de contrat ; le projet de carbone forestier, mené avec la Funai notamment, a été validé grâce à l’obtention de deux labels internationaux. En préservant de grands espaces de forêt tropicale (320 km²), la communauté Suruí va accéder directement au marché du carbone. Cela pourrait lui rapporter jusqu’à 4 millions de reais2 par an. Ces revenus abonderont un “fonds souverain” destiné à des initiatives de développement durable, comme le tourisme vert ou la production agricole sur les nombreuses terres déjà défrichées.

[1] Fundação nacional do Índio.
[2] 1,6 million d’euros.

Photo de Wilmar Santin