Le Suriname et l’Indonésie ont des liens historiques et affectifs très forts. De 1890 à 1839, près de 33 000 Javanais sont venus s’installer comme travailleurs sous contrat dans l’ancienne colonie néerlandaise, et seulement 20 à 25% d’entre eux sont retournés au pays. Désireuse de renforcer ses échanges économiques avec sa patrie d’origine, la communauté suri-javanaise, majoritairement musulmane, peut compter sur la Banque islamique.
Lors de la 41ème Réunion annuelle du Conseil des Gouverneurs de la Banque islamique de développement (BID) en mai dernier à Jakarta, Jim Rasam, PDG du Groupe Intermed et directeur de la banque islamique Amanah au Suriname, a noué des contacts avec différents hommes d’affaires indonésiens désireux d’investir au Suriname. L’un d’entre eux a manifesté son intérêt pour la création d’une centrale électrique, une usine à papier et un centre de recherche sur les cellules souches. Avec un secteur privé surinamais voué à se développer et la Banque islamique prête à devenir un acteur majeur en finançant les petites et moyennes entreprises de part et d’autre, le futur est prometteur. Selon Rasam, la stratégie de développement doit s’appuyer sur le réseau diplomatique et la connexion islamique. « Maintenant, les projets peuvent être financés par la Société islamique pour le développement du secteur privé (SID, filiale de la BID). Le Suriname peut également compter sur les investisseurs des pays de l’Organisation de Coopération Islamique (OCI). Nous allons commencer avec l’Indonésie, et passer ensuite à d’autres pays. »
Suriname, plaque tournante
 Dominicus Supratikto, ambassadeur indonésien au Suriname, était aussi du voyage. Il a endossé le rôle de facilitateur entre les entrepreneurs suri-javanais, l’Indonésie, l’OCI et la BID.
 Le Suriname peut agir comme exportateur vers un certain nombre de pays d’Amérique latine où l’Indonésie cherche à élargir son marché. Les Javanais du Suriname sont très familiers avec les produits, la langue et la culture indonésienne et ils peuvent devenir les agents de cette expansion. L’Indonésie exporte de nombreux produits – crackers, batik, herbes aromatiques, meubles – et fournit aussi des infirmières au Suriname.
 Selon Supratikto, le Suriname peut devenir dans la région une plaque tournante pour la distribution de nombreux produits indonésiens, permettant ainsi au plus grand pays musulman (200 millions d’habitants) d’atteindre les marchés latino-américain et caribéen.
Le mauvais exemple chinois
 Selon Rasam, il est important d’établir des centres de production au Suriname, plutôt que faire comme la Chine qui, par exemple, importe le bois surinamais sans transfert de connaissances et de technologies. Les Chinois ne créent pas d’emplois, ne transfèrent aucune technologie mais exploitent simplement les ressources naturelles du pays, disent certains critiques.
Islamophobie En offrant des opportunités d’affaires compatibles avec la charia – sans avoir vocation à devenir une république islamique – le Suriname devient plus attrayant pour les investisseurs et les entreprises islamiques. On observe cependant des tensions : comme chez son voisin le Guyana, l’islamophobie progresse. Cela pourrait freiner le rapprochement économique avec les pays islamiques. Il y a une forme d’hystérie autour des termes comme charia, halall, sukuk*. « Ces craintes proviennent de la méconnaissance de la finance islamique, de l’Organisation de Coopération Islamique et de la Banque islamique », selon un parlementaire surinamais. *Le sukuk est un titre financier islamique, similaire à une obligation conventionnelle, respectant les préceptes religieux de la charia. Sources : Starnieuws, CaribbeanNewsNow.

Photo ce dessus : Tongar, un village de rapatriés surinamais dans l’île indonésienne de Sumatra – P-O Jay – Octobre 2009

Relire notre article : Java sur les rivages de l’atlantique, 120 ans de présence javanaise au Suriname

http://www.une-saison-en-guyane.com/?p=416