En juin 2017, la monnaie locale guyanaise, le kwak, n’est encore qu’à l’état de projet. Mais ce projet a déjà séduit une quarantaine de personnes, aujourd’hui membres de l’association Kwak Lagwiyann. « Les billets seront imprimés à la fin de l’année 2017 et lorsque le kwak sera palpable, il deviendra une réalité concrète », assure Meryll Martin, le président de l’association. Il imagine l’évolution dans les prochaines années de cette monnaie complémentaire à l’euro.
« C’est une solution d’avenir pour une transition économique. Elle permettra de changer le rapport à l’argent que nous avons aujourd’hui. Le kwak est une monnaie d’échange et non pas de spéculation comme l’euro. Bien entendu, nous ne sommes pas contre l’euro, mais nous voulons une diversification monétaire. Je ne peux pas prévoir où nous en serons dans 30 ans, mais d’ici là il aura fallu réfléchir à une gouvernance, un collège des particuliers, des entreprises, des associations et des institutions. Les gens confient leur argent à l’association, en échange de la même valeur en kwak, donc il faut les inclure dans la gouvernance afin qu’ils puissent faire remonter leurs attentes et que les intérêts de chacun soient préservés. L’association veut sensibiliser les gens à une économie circulaire. On est sûr que cet argent ne va pas sortir de Guyane puisque c’est une monnaie qui n’aura court que dans un espace limité localement.

billetAinsi, un commerçant va aller plus facilement vers un producteur local qu’il pourra payer en kwaks. Cette monnaie pourra permettre de favoriser les ressources locales et les savoir-faire locaux. À terme on peut espérer qu’elle pourra renverser la balance import-export qui ne joue pas en la faveur de la Guyane. Nous ne sommes affiliés à aucun groupe politique, mais nous remarquons que le kwak répond aussi à un sentiment identitaire présent en Guyane. De façon plus concrète, on pourra imaginer à l’aéroport un guichet proposant un pack “tourisme” avec l’adhésion et des offres pour échanger les euros en kwaks. Pourquoi pas des bourses d’études territoriales en kwaks ? Et, si je me laisse rêver, nous pourrions quantifier, après prospection, l’or présent sur notre territoire et évaluer sa valeur en kwaks, pour servir de réserve, et mettre cet argent directement en circulation sans extraction. » Meryll Martin sourit et continue à lister les nombreuses possibilités qu’offre le kwak. Ce qui est sûr c’est que dès la fin de l’année des coupures de 1, 2, 5, 10 et 20 kwaks seront disponibles. Ces billets auront été dessinés par des élèves et des étudiants guyanais. Et, dans un avenir proche, Meryll Martin espère pouvoir utiliser du papier et des pigments locaux, ce qui n’est hélas pas encore possible.

Propos recueillis par Sylvie Nadin