Voici un rapport fourni par le collectif STOP MALATHION écrit par un ingénieur agronome français. 

Conformément à la solide tradition de l’arbitraire sous prétexte de l’intérêt public dont la définition reste le privilège de quelques surpayés d’une caste supérieure, le respect des citoyens a fait encore défaut dans le département de la Guyane. Le débat sur la pulvérisation du malathion n’a pas eu lieu.

L’absence de dialogue de la part des autorités, issue de l’absence de tout contrôle sociétal a pris une tournure plus désagréable le 04 décembre dernier lors de l’émission Point d’interrogation de la radio Guyane Première.

Les responsables administratifs ont balayé questions et arguments sans réponses véritables, allant jusqu’à moquer les citoyens contestataires. Des accusations de malhonnêteté se sont rajoutées à la prestation, tout comme la « désinformation » prétendument pratiquée par ces administrés osant contester la décision forcément indiscutable puisque vaillamment imposée.

Aux lacunes de leur argumentation de foi douteuse s’est ajoutée la confirmation d’une méconnaissance certaine du sujet chez les responsables en charge de la santé publique en Guyane.

L’argumentation des citoyens engagés contre la pulvérisation du malathion n’est pas aisée. Cause en est la complexité du sujet dont plusieurs éléments restent objectivement insaisissables faute de situation témoin. Tel est le cas des épidémies, des effets des traitements diffus mais aussi de la toxicité à long terme.

Cette difficulté apparente de l’argumentation se trouve aggravée par la posture des autorités, promoteurs de cette malheureuse pulvérisation : c’est pour votre Sé-cu-ri-té. C’est pour votre San-té.

Ce langage caresse la population dans le sens du poil, expliquant bien des inerties.

Et voilà que le n’importe quoi déguisé en « protection de la population » surpasse toute nécessité de réflexion. Réflexion qui, disons-le, ne pourrait être que très laborieuse au vu des déclarations des officiels, preuves inutiles de leur méconnaissance déjà revendiquée.

Quant à la propre pratique de la pulvérisation, les autorités s’y adonnent depuis des années. A première vue, cette pratique paraît adéquate, car elle est répandue à travers du monde. Ceci est d’ailleurs l’un des arguments actuels des autorités : « On le fait partout, et depuis longtemps ! » Circulez donc, c’est forcément bon…

Puis, comme la préservation de la santé de la population détient le privilège du politiquement correct, les citoyens engagés contre cette pulvérisation ne contestent pas sa pratique. Ils se focalisent sur le seul malathion. Pourtant, il y a quoi dire sur le principe même de la fumigation grandeur nature.

Premièrement, le dépassement des pratiques habituelles s’appelle évolution mentale. Quant au suprême argument qu’est la recherche de la santé publique, cet argument est tordu à souhait, car la recherche de la santé publique n’est pas un argument, mais un but. Perdre de vue cette évidence signifie de sombrer dans la justification des moyens par le but. Sombrer dans la démagogie, en définitif. Tel est le cas avec cette pulvérisation erronée.

La question de la pulvérisation du milieu, à fortiori d’un milieu habité, appartient à la science et non pas aux errements. Le fait d’invoquer un risque réel ou imaginaire ne justifie pas n’importe quelle mesure. Il est déplaisant que certains individus dramatisent un phénomène pour imposer un traitement contestable à la population, traitement dont l’efficacité et les risques restent aléatoires et mal évalués, tout en dénigrant leurs contradicteurs, les qualifiant de malhonnêtes et de manipulateurs.

L’épandage aérien des insecticides a mauvaise presse. Il est inutile d’en rajouter, un esprit sain ne pouvant le concevoir comme souhaitable. Abeilles, santé publique etc.

La pulvérisation d’insecticide, à fortiori en milieu urbain, ne correspond pas à l’air du temps, sans être interdite formellement. Pas encore. En 2003, le Parlement européen a adopté un avis recommandant l’interdiction de l’épandage aérien. La directive du 17 décembre 2007 en a été la suite, prévoyant « une alternative à la lutte chimique quand c’est possible, l’interdiction des traitements aériens sauf dérogation, la possibilité à chaque État membre de prendre des mesures spécifiques. Il restera la possibilité d’autoriser à titre dérogatoire les traitements aériens dans la mesure exclusive où tout autre moyen serait matériellement inopérant. »

Ce texte un tantinet naïf ne dit mot sur la raison de la pulvérisation, ni sur le milieu traité. Il sous-entend un usage agricole, donc un traitement des champs loin des villes, restant très vague et laissant toute latitude aux états, concrètement aux administrations locales.

Précisons de suite que la façon guyanaise n’est pas un épandage aérien proprement dit, c’est un épandage du pauvre. Un épandage aérien garantit une répartition homogène et calculée du produit, sur une surface importante. C’est essentiel pour l’efficacité du traitement tout en évitant l’exposition exagérée des habitants. L’épandage « traîne-savate », depuis un véhicule, est très différent. Sa couverture spatiale est nulle, se concentrant sur la voie publique. Son efficacité est réduite en conséquence, devenant petite, très petite…tout en impactant les habitants de manière beaucoup plus forte, car les véhicules déversent le poison face aux maisons, leur garantissant une concentration qu’un épandage aérien ne provoquerait jamais.

Voilà ce qui explique les quantités préconisées par l’OMS, mentionnées à la page 39 du rapport de l’ANSES : en cas d’application aérienne la dose visée est 260 g/ha, alors qu’à partir du sol la dose se limite à 60,8 g/ha. Avec un calcul impossible à respecter, car la couverture étant saccagée, que signifie le 60,8 g/ha ?

Relevons alors que l’inefficacité exigée de tout autre moyen n’est pas avérée. Voire, le directeur de l’ARS insiste que le seul moyen efficace est la destruction physique des réservoirs stagnants, en quoi il a parfaitement raison. Mais alors, où restent les mesures de destruction des nids de moustiques, possibles ailleurs (Brésil, Antilles) mais pas en Guyane ?

Les responsables de cette décision ont alors erronément dérogé aux textes européens, ou, pour le moins ont méconnu son esprit. Car l’inefficacité des autres mesures n’est pas démontrée, bien au contraire. Plus étonnant et pire, dans votre cas guyanais c’est l’efficacité de la pulvérisation qui est reconnue comme aléatoire : selon l’Institut Pasteur « utilisé à une dose opérationnelle, il est donc possible que le malathion présente une certaine efficacité contre les populations d’Aedes aegypti de

Guyane »

Comment, une mesure dérogatoire qui ne présente qu’une possibilité d’avoir un certain effet à une dose de cheval inconnue ? L’efficacité d’une mesure dérogatoire devrait être indiscutable !

Au lieu d’apprécier les attentes des textes cités et ce qui précède, les autorités avancent la mortalité potentielle de l’infection comme épouvantail, ignorant au passage que toute épidémie, y compris la grippe la plus banale provoque une certaine mortalité, car ainsi est faite la nature. Ils assènent que la réduction attendue du nombre des moustiques vecteurs préviendra l’infection d’une partie importante de la population.

Il n’est tout de même pas interdit de rappeler quelques observations dissonantes face à la bienséance officielle.

En premier lieu, il faut bien garder en tête que la réduction du nombre des moustiques vecteurs n’éliminera pas le chikungunya. Le virus est présent en Guyane et y restera. La pulvérisation de l’Etat de New York, citée comme preuve du bien-fondé de la décision guyanaise est une comparaison fausse : la situation y était tout à fait différente, s’y agissant d’une tentative d’élimination d’un virus par ailleurs autrement plus dangereux, dont l’éradication fut tout à fait envisageable vu qu’il venait d’arriver sur une petite portion du territoire américain, îlot circonscrit dont le paysage s’est prêté à une pulvérisation aérienne massive, courte et immédiatement efficace, quitte à la faire avec du gazoil comme solvant… Il s’agissait donc d’une configuration, d’un enjeux et d’un but tout à fait différents de ceux de la Guyane, où l’élimination de la cible est impossible.

Quant aux pulvérisations pratiquées dans d’autres pays nordiques, toujours pas voie aérienne, elles visent le plus souvent la réduction du désagrément. Il est fondamental de comprendre que la lutte contre les moustiques en tant que désagrément n’a strictement rien à voir avec la lutte contre les moustiques en tant que vecteurs de maladie : si vous éliminez 80 % des moustiques, le désagrément aura diminué considérablement et la ville canadienne en question sera respirable. Mais si vous éliminez 80 % d’un moustique vecteur d’une maladie, votre efficacité sera à peu près zéro…

Ajoutons aussi que lorsqu’un traitement en zone tempérée a pour but la lutte anti-vectorielle proprement dite, la situation demeure toujours très différente de celle de la Guyane : l’une des raisons en est la couverture végétale, celle de la Guyane constituant un facteur très limitant pour l’efficacité de ce genre de pulvérisation, que ce soit depuis un avion ou depuis un véhicule dérisoire.

L’autre raison interdisant la comparaison avec les régions tempérées est l’absence d’hiver. Au Nord, le traitement ne dure que quelques semaines tandis qu’au chaud il doit être quasi constant.

Et patatras. Une pulvérisation de six à huit mois se contredit elle-même : un traitement chimique biocide NE DOIT PAS ETRE constant, encore moins si le produit est de large spectre, ce qui est le cas. Si le traitement s’avère d’être constamment nécessaire, c’est que ce traitement est inadapté. Précisons : ce n’est pas encore le malathion qui est inadapté (il le sera aussi) , mais la pratique de la pulvérisation elle-même. Il s’agit juste du b-a ba : le déversement d’insecticide induit la résistance, ce qui exige le changement régulier du produit, disons par période de trois à cinq ans. Et des molécules nouvelles et acceptables, il n’y a en pas des quantités.

Est-ce que votre médecin vous prescrit des antibiotiques à usage constant, en vue de vous prémunir contre les microbes ? Non. Pourtant, c’est la logique de la pulvérisation en Guyane.

Entre parenthèse, la pratique locale est encore plus brute dans l’erreur : les officiels mettent en faveur du malathion que cette molécule a déjà été utilisée en Guyane contre les moustiques, durant des années. Seulement, cet « argument » n’en est pas un. La science dicte tout le contraire : s’il a déjà été utilisé durant des années et jusqu’à une date récente (jusqu’à 2009) ce produit doit être écarté pour cette seule raison.

Il était tout à fait inutile de jouer la Procédure en recherchant la résistance des moustiques. Il est inutile de chercher la forme sans connaître le fond. Brasser de l’air pour faire semblant… Un professionnel aurait pu écarter le malathion comme hors jeu et sans aucun examen, sans faire la moindre recherche, sans dépenser le moindre centime public dans le cadre de la convention Etat-Institut Pasteur.

Il est très étonnant que l’ensemble des officiels, y compris la directrice des pulvérisations du Conseil Général puisse argumenter de manière aussi erronée.

En conséquence de ce qui précède, en Guyane le but ne peut être que la diminution des populations de vecteurs en dessous des seuils nécessaires à la transmission. Sauf que pour y arriver, on l’a vu, le traitement doit être très efficace… ce qui suppose un milieu le plus ouvert possible, tout le contraire de votre département. Un traitement moins efficace que le nécessaire n’arrêtera pas l’épidémie mais seulement l’étalera dans le temps tout en assurant quelques dégâts collatéraux. Voilà le double hic, méritant quelques éclaircissements.

Il n’est pas prouvé que l’épandage d’insecticide diminue le nombre des personnes atteintes dans une configuration où le vecteur persistera toujours, échappant aussi au diapason hivernal. Quant à son effet sur la montée en puissance d’un virus, appelée épidémie, il demeure impossible de le mesurer et de comparer à quoi que ce soit. Par contre, nous pouvons déduire les effets.

Rappelons alors que la dynamique des épidémies leur est propre : une fois qu’un virus est présent avec son vecteur, le nombre des personnes infectées sera déterminé in fine par l’état sérologique de la population. Un virus se répand tant que le nombre des personnes non-immunisées est suffisant et que le vecteur existe, ce qui est le cas. Au-delà d’un certain pourcentage d’individus résistants au sein de la population, la propagation du virus se trouve entravée et l’épidémie s’éteint, attendant que le nombre des individus sensibles remonte, lui permettant de prospérer de nouveau. (A moins qu’une mutation ne lui permette de rebondir, ce qui n’est pas attendu de la part de ce virus assez stable.) Selon les observations, le chikungunya reviendrait tous les vingt ans à peu près, ce délai étant le temps nécessaire pour que le nombre d’individus possédant l’anticorps diminue suffisamment au goût du virus, lui permettant de se relancer.

Le nombre des vecteurs ne détermine que la vitesse de la propagation. Avec une pulvérisation très-très efficace on peut éliminer le vecteur et le virus avec. Encore une fois, ceci est impossible en Guyane.

Une pulvérisation très efficace peut réduire, théoriquement, le nombre des transmissions à tel point que la maladie devienne inaperçue sinon accidentelle, un peu comme la malaria.

Quelle que soit l’efficacité du traitement, du moment où le vecteur n’est pas complètement éliminé, la pulvérisation doit continuer éternellement puisque la population reste sensible, précisément parce qu’en cassant l’épidémie on a interdit l’acquisition de l’immunité par le plus grand nombre. C’est ainsi que le traitement chimique est condamné à la continuité, sous peine de voir l’épidémie réapparaître à n’importe quel moment. C’est le même mécanisme qu’avec les enfants surprotégés : à défaut de se frotter aux microbes, ils seront davantage atteints après…

Une efficacité imparfaite n’aura pas d’autre effet que de ralentir la transmission, ce qui se traduira par un nombre de malades inférieur par intervalle donné – mais sur une durée plus longue. L’observateur y verra un aplatissement de la courbe statistique, moins raide mais plus étirée, avec des rebonds. Mais la surface se trouvant sous la courbe sera la même, autrement dit vous aurez le même nombre de personnes atteintes. Au final, la population sera tout autant frappée par la maladie qu’en l’absence de lutte, car ce qui doit arriver, arrivera…

Moins le traitement est efficace, moins la courbe se différera de celle que l’on devrait observer sans traitement aucun.

Alors, il nous reste à estimer l’efficacité du traitement retenu. Rappelons encore une fois que rien n’y est mesurable : on ne peut parler que par déduction logique partant des nos connaissances, mais personne de pourra vous donner des chiffres précis. Quant à à l’observation de l’Anses sur la page 11 de son rapport consacré au malathion et cité par Guyaweb : « Très peu de données récentes sont disponibles sur la Guyane. En l’état, il est impossible de se prononcer sur l’efficacité … en Guyane. », il est permis de répondre qu’il n’y a pas besoin de données récentes ou anciennes sur le sujet, il coule de source qu’une pulvérisation des bas-côtés et des rues guyanais ne puisse avoir qu’un effet dérisoire, quel que soit l’insecticide, tuant quelques moustiques malchanceux ou suicidaires, dopant un bon nombre ayant profité d’une dose homéopathique induisant leur résistance et laissant de marbre la population d’A. aegypti dans son ensemble, exactement comme l’avait expliqué le remarquable chimiste du CNRS dans l’article de Monsieur Farine.

Qu’il ne déplaise aux promoteurs de la pulvérisation urbaine à la manière guyanaise, il paraît extrêmement optimiste voire béat de croire que la fumigation des zones résidentielles de la Guyane arrivera à tuer suffisamment de moustiques pour bloquer la transmission. Quiconque de sensé jetant un œil sur l’étendu du territoire et sur la densité de la végétation bordant les routes guyanaises ne pourrait imaginer que la fumigation dérisoire de ce milieu puisse arriver à bout d’un moustique…

Il ne s’agit pas encore du malathion mais de la pulvérisation en général, quel que soit l’insecticide, y compris le plus efficace…

Accessoirement, l’écologie prévoit, elle aussi, le caractère inadapté de la pulvérisation d’un milieu tropical où la complexité de l’écosystème dilue son effet.

Pour ces raisons la pulvérisation apparaît inadaptée pour la Guyane. On n’y peut espérer qu’un abaissement de l’intensité de l’épidémie, rendue plus longue, plus étirée, au prix d’une pulvérisation constante. Les dernières constatations communiquées (www.guyaweb.com/actualites/news/sciences-et-environnement/chikungunya-la-barre-des-10-000­cas-non-encore-atteinte/) ou http://guyane.la1ere.fr/2015/01/13/sante-les-chiffres-du-chikungunya­221412.html s’inscrivent parfaitement dans ce sens. La Guyane connaîtra donc peu ou prou le même nombre d’infections qu’elle connaîtrait sans aucune pulvérisation, au prix des dégâts collatéraux sanitaires et environnementaux qu’aucune instance scientifique n’ose écarter, indépendamment des certitudes très personnelles des responsables administratives et de leurs convictions sur l’incapacité des citoyens contestataires.

En somme, l’efficacité des pulvérisations d’insecticides restera un vœux pieux auquel il convient de croire au nom de la bien-pensance obligatoire devant une mesure volontariste, purement administrative. Au lieu de s’accrocher à un procédé inadapté, la pulvérisation des rues devrait être repensée et probablement abandonnée dans un milieu comme la Guyane.

Y aura-t-il un bénéfice quelconque de cette procédure ? Si, il en existe : une épidémie étirée soulage le secteur médical, calme la psychose collective et valorise l’action publique : on vous a sauvés !

Quant au choix du malathion… Le malathion est un insecticide de la famille des organophosphorés. Cette famille est actuellement la plus ancienne parmi les insecticides existants, les organochlorés étant interdits depuis belle lurette, à la fière exception du chlordécone des Antilles, avec le résultat que chacun connaît.

Les organophosphorés seront les prochains insecticides retirés des marchés. Le malathion est à l’usage depuis 1952. C’est une véritable antiquité dont la dose normale d’utilisation, sans résistance à vaincre, est jusqu’à mille fois supérieure à celle des insecticides modernes. Du paléolithique de l’agrochimie, en somme.

Les organophosphorés sont des neurotoxiques, agissant par la perturbation des transmissions nerveuses. C’est pour cette raison et grâce à leur efficacité universelle que les plus petites molécules de cette mémorable compagnie sont essentielles dans l’arsenal chimique militaire moderne : tous les gaz (en réalité, des liquides) de combat modernes appartiennent à cette famille, tels que tabun, le Ziklon-B, le sarin, le soman, les agents V etc.

Cette mise au point n’est pas destinée à « créer de la psychose », comme accusent en chœur la préfecture, le directeur de l’ARS et la responsable fumigation du Conseil Général, mais à rappeler la légèreté douteuse dans le document préfectoral « LE CHIKUNGUNYA : VRAI ET FAUX » où les autorités admettent que le malathion est neurotoxique, s’empressant à ajouter que « Tous les insecticides ayant pour cible les insectes au stade « adulte » sont des neurotoxiques y compris ceux à usage domestique en vente libre dans le commerce (bombes insecticides, diffuseurs électriques, serpentins…) »

Clarifions alors cette manipulation insaisissable pour le quidam : la neurotoxicité des organophosphorés n’a rien à voir avec celle des pyrèthrinoïdes de synthèse que l’on trouve dans les produits à usage domestique : les organophosphorés sont neurotoxiques pour tous les animaux et aussi pour l’homme, tandis que la particularité des pyrèthrinoïdes est qu’ils ne sont (neuro)toxiques « que » pour les animaux à sang froid (insectes, batraciens, poissons etc).

C’est pour cette raison que les sprays et d’autres spirales ne contiennent QUE des pyrèthrinoïdes, tel cyperméthrine, alphamétrine etc. Personne, de par le monde, n’aurait l’idée de les charger avec une molécule organophosphorée.

Personne, de par le monde, n’aurait l’idée de préconiser un organophosphoré pour un usage à l’intérieur des habitations.

Pourtant, les autorités martèlent que le malathion n’est pas plus dangereux que la deltaméthrine. Pour l’asséner, elles n’hésitent pas à confondre leur toxicité et leur champs d’action. Le Français moyen ne peut qu’espérer qu’il s’agit d’une ignorance et non pas d’une manipulation délibérée, sans que l’ignorance soit moins néfaste…

On ne compare pas un organophosphoré à un pyrèthrinoïde. Il y a des choses qui ne se font pas.

La seule comparaison qui mérite d’être notée est leur inefficacité commune face aux moustiques, pour cause commune aux deux molécules : une utilisation inadéquate par le milieu comme par sa durée (une dizaine d’années d’affilée!).

Le président du Conseil Général n’aurait pas dû avancer la durée d’utilisation du malathion par le passé. Ce n’est pas un argument en la faveur de sa réutilisation, c’est un argument pour l’écarter ! Il aurait mieux fait d’interroger la responsable de la démoustication sur la durée incroyable de l’usage du même produit, chose injustifiable.

Reconnaissons que le malathion est l’un des moins toxiques de sa redoutable famille. Sa LD50 est donnée entre 60 et 5000. Le problème du malathion ne vient pas tant de sa toxicité aiguë que la LD50 est censée indiquer, mais de ses effets à long terme associés à l’usage présent et aussi de la manière dont il est utilisé.

Il a été suffisamment répété par ses promoteurs que le malathion se dégrade très rapidement. En réalité, sa demie-vie est d’une petite semaine dans l’eau, mais va de quelques jours jusqu’à trois semaines dans le sol et sa décomposition est nécessairement beaucoup plus lente à l’intérieur d’une habitation. C’est une vitesse de dégradation moyenne, on a déjà fait beaucoup mieux.

Compte tenu de ce rythme de dégradation, la pulvérisation hebdomadaire entraîne inévitablement une accumulation du produit à l’intérieur des habitations exposées. Durant six mois.

L’usage de cette molécule en milieu urbain pose moins de problème là où les habitations possèdent une isolation. Tel est le cas en climat tempéré mais aussi pour les villas guyanaises cossues, climatisées, dont le confinement est possible. Surtout si ces villas se trouvent face à l’océan, balayées par les alizées et sans moustiques…

Il en va différemment pour les maisons plus modestes, construites selon le bon sens en vigueur , dites « bioclimatiques », c’est-à-dire aérées au mieux. Ces habitations sont de véritables pièges à malathion depuis le début de la pulvérisation : le passage régulier du diffuseur fait que la concentration du malathion ne peut qu’augmenter entre leurs murs, pour la simple raison que la dégradation de cette molécule prend beaucoup plus de temps que l’arrivée du prochain passage. Ce fait est totalement ignoré dans le discours public.

C’est pour cette raison que les habitants de ces maisons peuvent ressentir la pulvérisation comme une agression. Une forme de violence sociale.

Pourtant, l’ANSES parle de la surexposition incontrôlée des habitants des maisons typiques guyanaises soumises à un traitement prolongé. A la page 38 de son rapport, il souligne que l’absence de risque ne peut être démontré pour les résidents dans la zone traitée avec du malathion. Et encore, l’ANSES ne remarque pas l’accumulation inévitable du produit à l’intérieur.

Le malathion n’est pas très toxique mais reste un organophosphoré : à l’exposition prolongée, son effet semble s’accumuler et donne lieu à l’intoxication aiguë. Combinez ceci avec le climat guyanais, avec le durée démente du traitement (six mois!) et vous avez une équation jamais posée.

Mais ses effets indésirables résident surtout à long terme, après exposition prolongée. Rappelons que 6 mois de pulvérisation signifie une exposition prolongée, dite chronique. Dans ces conditions, le malathion est suspecté d’être un cancérigène et est clairement reconnu comme mutagène par de nombreuses études.

L’effet à long terme des doses faibles reste inabordable car l’isolement des effets des autres facteurs est impossible. Comment prouver des années plus tard que la naissance d’enfants malades seraient dues à une exposition prolongée au malathion, mutagène reconnu ? Raison pour laquelle vous trouvez aussi des avis très accommodants sur le malathion, selon la saison et les motivations diverses. Qu’est-ce que cela signifie ?

Ceci signifie que le nombre des cancers induits par ces six mois d’enfumage de masse restera inconnu à jamais, à moins de lancer une étude à grande échelle sur l’ensemble de la population concernée, la suivant sur vingt ans… Et encore, le résultat sera un discours indigeste qui dira tout et son contraire.

Idem pour le nombre et la gravité des affections dues aux mutations induites dès la conception.

Idem pour les affections endocriniennes que vous verrez sur vos enfants dans vingt ou trente ans, lorsqu’ils développeront des maladies auto-immunes.

L’irritation respiratoire reportée par de nombreuses personnes ne peut que favoriser l’apparition future des allergies diverses, toujours chez les enfants bien entendu.

L’irritation cutanée très récemment reportée par les lecteurs du site Blada.com n’a rien d’étonnant : si à dose dite homologuée le produit décape déjà les voitures, pourquoi s’interloquer devant une irritation cutanée, observée quelques semaines après le début du traitement, récurrente après le passage de la « baygonneuse » distribuant le produit à une dose assurément supérieure ?

L’irritation cutanée est d’autant plus normale que le solvant est lui aussi très irritant (pétrole à pH bas).

Le malathion a comme particularité d’être extrêmement bien absorbé par voie respiratoire, bien mieux que par voie orale. Argument majeur pour ne pas le pulvériser en zone résidentielle.

Si le principe de précaution devait être appliqué, alors c’est bien dans le cas présent.

Le caractère inadéquat de la pulvérisation en elle-même, pratiquée par un insecticide douteux rien qu’à cause de sa famille s’aggrave avec la résistance des moustiques.

A quoi rime d’utiliser un insecticide inefficace, dont la dose doit être très élevée par rapport à l’usage normal ? Les autorités n’ont pas précisé la quantité réellement épandue. La seule information existant dit qu’à la dose diagnostique (0,8 %) 70 à 90 % des moustiques survivent.

Il a été aussi annoncé qu’à 5 % la totalité des moustiques meurent. Or, ces 5 % représentent 15 à 20 fois la dose considérée comme normale sur le terrain, signifiant efficace à 100 %.

Monsieur Farine a beau insisté sur la signification de cette « dose diagnostique », il n’a pas eu de réponse. Aidons-le :

La dose diagnostique est ce que son nom indique, c’est-à-dire une dose utilisée en laboratoire pour constater l’existence de la résistance et servant de premier repère pour les mesures ultérieures.

Cette dose est logiquement supérieure à la dose d’usage déterminée pour le produit. Si résistance il y a, cette dose laissera des survivants. De leur nombre on déduit le niveau de résistance.

Si la dose diagnostique préconisée par l’OMS est de 0,8 % et rien de plus, cela signifie que si à cette dose l’efficacité mesurée n’est pas à la hauteur attendue, la molécule doit être abandonnée.

Le choix de la dose diagnostique de 5 % ne rime à rien, étant la dose retenue pour d’autres espèces. La seule utilité de cette analyse supplémentaire était de pouvoir claironner qu’on les a tous tués…

Mais surtout, il manque le reste du travail : l’Institut Pasteur n’aurait pas dû se contenter d’annoncer qu’à 5 % toutes les bêtes sont tuées. Ils auraient pu tout aussi bien dire qu’à la dose de 80 % tous sont tués… Non, il aurait fallu descendre la dose et déterminer précisément quelle est la concentration minimale qui tue encore la totalité – ou quasi-totalité – des cibles. C’est une information capitale, non seulement pour connaître précisément le niveau de résistance donc le bien-fondé de l’usage du produit mais aussi parce qu’elle sert à calculer la dose utile, étant la base du calcul du mélange à pulvériser.

Le fait que ce travail n’ait pas été fait ou resté non communiqué en dit long sur l’efficacité du malathion et sur la motivation des certains.

La dose opérationnelle réelle se compose de la concentration préparée et de la quantité que l’on en distribue, cette dernière dépendant essentiellement des moyens techniques et de la vitesse.

Voilà ce que signifie la phrase « il sera indispensable de vérifier l’efficacité réelle des formulations retenues et de leurs méthodes d’application en conditions opérationnelles” à laquelle Monsieur Farine n’a pas reçu réponse.

C’est ainsi que sur le terrain on ne parle pas de concentration (notion de laboratoire) mais de gr/hectare, cette quantité dépendant de divers facteurs.

C’est ainsi qu’on se rend compte des difficultés de la pulvérisation traîne-savate : même si l’on connaissait la concentration nécessaire, comment déterminer la quantité distribuée par hectare ? Calcul aisé depuis un avion, mais depuis un véhicule ? Sur le plan biologique, que deviennent les cibles insuffisamment atteintes ? (Ils développeront de la résistance, étonnez-vous)

Cette démonstration est la traduction géométrique de l’absurdité de la pulvérisation des bas-côtés, surtout en milieu tropical.

Pour remplacer ces informations majeures, le public a eu droit à une mystification exemplaire :

«Utilisé à une dose opérationnelle, il est possible que le malathion présente une certaine efficacité»

Rien à dire, car cette phrase ne dit rien : sans connaître la dose opérationnelle, tout reste possible, surtout le rien…

A défaut de précaution et d’analyse réelle, les promoteurs du malathion vous servent des propos surprenants, voire inquiétants. Lors de l’émission radio mentionnée (25:25), la responsable de la démoustication du Conseil Général a recommandé l’ouverture des portes et fenêtres au passage de la « baygonneuse » Après une explication laborieuse, elle insiste encore au

26 : 53.

L’histoire devient très corsée.

En parallèle, l’organisme canadien ARLA, pourtant très accommodant avec le malathion, préconiseentre autres de « fermer toutes les portes et fenêtres. Éteignez le système de climatisation et fermez les évents… », (www.hc-sc.gc.ca/cps-spc/pubs/pest/_fact-fiche/malathion/index-fra.php)

Alors, qui dit vrai ? Le bon sens et la recommandation canadienne, préconisant l’isolement maximal en calfeutrant la maison, ou Mme Chantilly qui vous recommande d’ouvrir tout afin de bien tuer les moustiques à l’intérieur ?

Au passage, les officiels présents ont traité leur contradicteur de malhonnête, car celui-ci a affirmé que l’ANSES recommande le calfeutrage. Alors que c’est tout le contraire, dixit les officiels, puisque l’ANSES recommande, selon eux, l’ouverture exprès des portes et fenêtres.

Le rapport de l’ANSES cite en effet une recommandation de l’OMS à sa page 6, où cette organisme évoque l’ouverture des maisons au moment du traitement. Mais il s’agit d’une citation et non pas d’une recommandation. L’OMS y parle de toute autre chose que le traitement retenu en Guyane : l’OMS évoque un traitement ponctuel, max. deux semaines, comptant max. trois pulvérisations, sous-entendant l’absence des habitants. Ce passage précise aussi que « Ces traitements (de période de deux semaines) n’ont pas vocation à être rémanents. » Cf. avec la fumigation de six mois…

(Lorsque le milieu scientifique parle de pulvérisations spatiales, il parle d’un traitement fortement limité dans le temps, de quelques semaines maximum.)

L’OMS évoque donc une situation et une ambition très différente de celle de la Guyane : elle sous-entend l’élimination des moustiques en deux semaines, chose incongrue en Guyane. Nous y retrouvons le caractère inadapté des fumigations au rabais dans un tel milieu.

Quant à la recommandation de l’ANSES sur laquelle les officiels se basent pour vous demander d’ouvrir portes et fenêtres, la voilà :

Page 38 : « ce scénario sous-estime l’exposition d’une personne présente dans la rue ou dans sa maison avec fenêtres et portes ouvertes … peut être directement dans le panache et pendant une durée plus longue. Sur cette base, il ne peut donc être démontré une absence de risque pour les résidents dans la zone traitée avec du malathion. »

 

Page 46 : « Des mesures doivent être prises pour éviter l’exposition des populations lors des traitements (telles que des mesures d’évacuation ou de confinement)»

Page 57 : « Dans le cas de leur utilisation en extérieur, des mesures organisationnelles et techniques (telles que l’évacuation ou le confinement des personnes à l’intérieur des habitations pendant le traitement) sont nécessaires pour limiter au maximum les expositions de la population. »

Page 59 : -Des mesures doivent être prises pour éviter l’exposition des populations lors des traitements (telles que des mesures d’évacuation ou de confinement).

Selon le protocole d’application, une surveillance de la population générale doit être envisagée en cas d’exposition.

 

Page 61 : Les portes et les fenêtres des habitations doivent être maintenues ouvertes pour permettre la pénétration du nuage de produit et améliorer l’efficacité du traitement (92).

(92) En cas d’utilisation en extérieur de produits à base de fénitrothion ou de malathion, pour lequel l’Anses recommande le confinement des personnes, cette mesure de gestion ne devra pas être appliquée.

C’est donc le citoyen dénigré qui a bien lu le rapport de l’ANSES, alors qu’il n’est pas payé pour. Dommage que Mme Chantilly et ses collègues y ont vu une invitation à l’ouverture des portes et fenêtres devant la baygonneuse, commettant une grave erreur.

Le moment est venu pour s’interroger sur leurs compétences. Ce jeux se fait avec la santé de vos enfants.

Les responsables s’étonnent dès le début de l’émission de la protestation tardive des citoyens. La raison est est pourtant simple : personne n’aurait crû qu’après un tel avis de l’ANSES les autorités concluent à l’usage de cet insecticide…

De nombreux protestataires se sont ajoutés après avoir constaté les effets du produit, déversé en une concentration manifestement trop élevée.

Mme Chantilly prétend (7:45) que l’absence d’autorisation du malathion est purement administrative, due au fait que son fabricant n’a pas fait de démarche pour le maintenir sur la liste des produits anti-vectoriels, faute de marché.

Pourtant, dans l’alinéa 125 du http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/? uri=CELEX:62007TO0326 le fabricant argumente contre l’interdiction du malathion évoquant les besoins de ses clients européens qui l’utilisaient comme anti-vectoriel…

Précisons aussi, car il y a besoin, que la capacité de développement de la résistance est commune, sans rapport avec l’écosystème, qu’il soit guyanais ou de « type européen ».

Profitant de l’antenne, le directeur de l’ARS vous apprend que la deltaméthrine et le Bti est le même produit… (24 : 09)

Ses propos sont invraisemblables. Non, Monsieur le directeur. La deltaméthrine est une molécule, un insecticide de synthèse. Le Bti cache le Bacillus thüringiensis var. Israeliensis. Cf Wikipédia. La distance entre les deux correspond à la différence entre un verre d’eau et un éléphant.

Cela devient consternant.

Il serait intéressant de savoir pour quelle raison Monsieur Meurin a limité l’investigation sur le malathion et la deltaméthrine ? Alors que l’inefficacité de la deltaméthrine était déjà entérinée et que le malathion aurait dû être écarté sans aucun examen.

A-t-il déjà entendu parler d’autres insecticides infiniment plus efficaces et moins nocifs que le malathion ? Puisque la dérogation ne pose aucun problème, le choix est là…

Les promoteurs du malathion affirment aussi (à la 16 : 00) que « le malathion n’est pas dangereux aux doses recommandées par l’OMS, celles qui ont été testées avec un maximum d’efficacité par (l’Institut) Pasteur, il n’y a pas de risque pour la santé humaine. C’est écrit dans les rapports qu’on a mis en ligne…»

Ces propos décousus dévoilent la perdition de l’intervenant devant le sujet.

L’OMS ne recommande pas de dose d’utilisation (très variable en fonction de l’utilisation). Encore une fois, l’OMS préconise une dose diagnostique, servant à détecter une éventuelle résistance et a en tirer des conclusions sur le bien-fondé de l’usage de l’insecticide.

Si la dose diagnostique est relativement faible pour A. aegypti, c’est parce qu’il faut être exigeant dans le cas d’un traitement anti-vectoriel.

Le maximum d’efficacité rendu public a été constaté à 5 %, non recommandé pour A. aegyptie. Non recommandé signifie que la nécessité du test à une telle concentration ne doit pas être nécessaire, la résistance de cet animal ne devant atteindre un tel niveau.

La concentration efficace du pesticide en soi est une mesure de laboratoire. Il permet l’appréciation immédiate du risque sanitaire, même si ce risque incorpore d’autres facteurs aussi, étant défini par la quantité de produit reçu en un laps de temps multiplié par la toxicité. La résistance constatée ne signifie pas que le produit sera mélangé à 5 % au moment de son utilisation, la résistance constatée indique qu’il faut au moins 20 fois plus de malathion que la quantité normalement préconisée, en absence de résistance.

Pour cette raison et contrairement à ce que sous-entend l’intervenant, aucune étude n’a jamais mesuré le risque sanitaire représenté par une dose expérimentale de 5 % et ne le fera pas. L’intervenant mélange pourcentage et quantité, mesure et levure, ses propos n’ont aucun sens.

Le représentant de la préfecture rassure du sérieux de la décision, prise à l’issue d’une concertation administrative conséquente. Comme si le respect des procédures pouvait garantir quoi que ce soit ! Ce n’est pas la Procédure qui vaut, Monsieur, mais l’intelligence mise en œuvre. Voir le nuage de Tchernobyl prétendument stoppé par les pandores en poste dans les Alpes, façon de Funès et cie, l’affaire du sang contaminé par tous les responsables mais jamais coupables, le trafic d’hypophyses à la CJ ou le chlordécone allègrement autorisé après le parfait respect de la PROCEDURE, le sulfureux dossier du Mediator, sans parler d’autres scandales sanitaires et divers.

Espérons que ce raisonnement ne tuera pas cette fois, à la place du chikungunya.

Cette collection d’originalités inquiète à juste titre. L’agressivité des intervenants officiels qui éludent les réponses se réfugiant derrière des accusations gratuites alimente encore les interrogations légitimes des citoyens.

Revenons sur la phrase ambiguë de l’Institut Pasteur :

« .. il est important d’insister que les populations d’Ae. aegypti de Guyane étant déjà résistantes à l’insecticide, les pulvérisations spatiales de malathion risquent de n’avoir qu’un impact limité sur le terrain (…) dans le cas où le malathion serait amené à être utilisé en Guyane, il sera indispensable de vérifier l’efficacité réelle des formulations retenues et de leurs méthodes d’application en conditions opérationnelles».

Messieurs, lorsqu’on constate une telle résistance au malathion qu’il faille multiplier la dose diagnostique par 6,25 et on en déduit son impact limité, on ne doit pas laisser entendre la possibilité d’utilisation de cette molécule ( voir passage en gras), car l’administration s’y engouffre aussitôt. Un avis scientifique est aussi ferme que possible. Une étude scientifique s’achève par une conclusion adéquate. Comme ceci : « … ce qui rend son application inappropriée, faisant courir un risque et un désagrément inutiles à la population.» Et point.

A toute évidence, les fonctionnaires concernés s’appuient sur cette malheureuse phrase de l’IP qui ne voulait pas être incisif. Ils en déduisent que les « sachants » ont donné un avis favorable au malathion. Erreur.

La pulvérisation du malathion en Guyane résulte d’une défaillance du processus de la prise de décision. Il est gênant que les scientifiques n’aient pu être plus incisifs dans leurs conclusions. Il est scandaleux de voir qu’alors que les instances scientifiques ont énuméré les arguments essentiels pour écarter le malathion, les exécuteurs n’ont pas voulu ou su en saisir le sens, préférant accuser les contestataires de mauvaise foi.

Cette défaillance n’existerait pas si la décision finale n’appartenait pas à des fonctionnaires mais aux scientifiques, en toute et réelle indépendance.

Il existe d’autres alternatives que la pulvérisation d’insecticides. Et il existe d’autres insecticides, plus efficaces et moins nocifs que cette molécule dépassée, inefficace et douteuse.

Dommage que tout changement demande un effort moins confortable que la répétition des gestes habituels servant à claironner l’action de certains.

A défaut d’être entendue, il appartient à la société civile à se faire entendre.

pour le Collectif Stop Malathion Un ingénieur agronome français CDC1999