À l’instar des dix dernières années, 2019 a été marquée par un déclin notable du nombre de pontes sur les plages guyanaises. Les efforts de comptage ont une fois de plus confirmé cette triste évolution. Si le constat n’est pas encourageant pour les tortues olivâtres et vertes, il est d’autant plus alarmant en ce qui concerne les tortues luths.

Les comptages de nids ont été menés sur les plages d’Awala-Yalimapo par les gardes de la Réserve Naturelle de l’Amana (RNA), de l’île de Cayenne par l’association Kwata et pour la première fois quotidiennement de Kourou par une bénévole du Réseau Tortues Marines Guyane (RTMG). Le survol de plages isolées de la RNA ainsi que 10 sorties terrestres à Aztèque et Caïman mouri ont permis de constater des traces de pontes dans ces zones reculées. L’instabilité et les difficultés d’accès à ces plages y compliquent cependant la mise en place d’un suivi assidu. Alors que le nombre de nids de tortues olivâtres, recensés principalement dans l’Est (n=2007), avait connu une augmentation significative depuis 2014, on assiste à une diminution spectaculaire entre 2018 et 2019, passant de 5214 à 2081 nids comptés sur tout le littoral. C’est la première chute aussi brutale observée d’une année sur l’autre depuis le démarrage du suivi à l’Est en 2002. Toutefois, 2018 avait connu l’arrivée exceptionnelle et inexpliquée de plus de 1000 nouvelles femelles jusqu’alors inconnues sur les plages de Cayenne et Rémire-Montjoly. Par ailleurs, une chute de l’activité de ponte avait déjà été observée en 2014. La comparaison entre 2018 et 2019 est donc à nuancer au regard de ces épisodes.

Les tortues vertes sont quant à elles venues pondre, comme à leur habitude, sur l’île de Cayenne (n=29 nids), et plus largement à Awala-Yalimapo (n=875 nids). Les quelques patrouilles organisées sur des sites isolés ont permis de relever la présence encourageante de 341 nids. Pourtant, l’évolution des pontes de cette espèce (n=1245 nids pour 2019) inquiète les scientifiques, qui s’attendaient à des chiffres plus élevés au regard des années précédentes.

Enfin, la situation de la tortue luth reste alarmante : après une légère augmentation du nombre global de nids entre 2017 et 2018, passant de 1255 à 1583, il est depuis retombé à 916, mettant en évidence un déclin continu de la géante des côtes guyanaises. Elle a en effet considérablement déserté les plages d’Awala-Yalimapo (127 nids sur la plage des Hattes et 19 sur les sites isolés), diminuant de moitié le nombre de pontes par rapport à 2018. Alors qu’une autre population de tortues luths avait fait son apparition dans l’Est guyanais à la fin des années 90, où le nombre de nids était en constante augmentation jusqu’en 2009 (16 714 nids sur toute la Guyane cette année-là), il est depuis passé en deçà du millier.

Le bilan global est donc inquiétant malgré les efforts déployés pour inverser la tendance. La plus grande tortue du monde détient cette année le triste record du plus faible nombre de nids pondus depuis qu’ils sont suivis, alors qu’on pouvait parfois assister à plus de 50 000 pontes par an à la fin des années 1980. Le déclin de cette espèce emblématique en Guyane relève toujours de diverses causes, naturelles ou anthropiques, sur lesquelles les différents acteurs du Plan National d’Actions en faveur des tortues marines continuent de travailler. Pour ne citer qu’elles, l’érosion côtière, les captures accidentelles dans certains dispositifs de pêche, le braconnage ou encore la prédation des oeufs par des chiens, font partie des enjeux prioritaires pour les années à venir. 

Le Réseau Tortues Marines Guyane regroupe l’ensemble des partenaires qui participent à la protection des tortues marines en Guyane, et mettent en oeuvre le Plan National d’Actions pour la conservation de ces espèces protégées.
Plus d’informations sur le site du réseau : www.tortuesmarinesguyane.com.
Contact presse : Nicolas Paranthoën, coordinateur du Réseau Tortues Marines Guyane
Tél. : 0694 13 77 44 / Mail : coordination.prtm@gmail.com