Philippe Soler est de ces personnages bien connus en Guyane, sa réputation dépasse les frontières communales de Cacao. Il doit sa renommée à deux choses : sa façon inimitable de poser les Theraphosa sur son ventre et son amour inconditionnel pour les insectes pour qui il a érigé un « micro musée », posé sur une butte du village dominant le marché.

L’histoire de l’association Le Planeur Bleu commence en octobre 1996. La « passion pour les insectes » de Philippe est largement antérieure et « remonte à l’adolescence lorsque j’allais chasser avec mon camarade de collège (…) dans la campagne auvergnate ».

à dix-sept ans, Philippe est parachuté en Guyane avec son père, militaire affecté au bureau d’études de la préfecture. Là, le syndrome Stendhalien le percute, « subjugué par la richesse, le gigantisme et la beauté de la faune entomologique de Guyane ». Les bêtes à huit pattes tracent le destin du jeune Philippe et il repart « à Montpellier préparer un DEUG de biologie » avec en guise de souvenir « une valise remplie de 200 espèces d’insectes guyanais ».

Revenu en terre guyanaise en 1983, il s’installe à Cacao deux ans plus tard. L’année d’après, il ouvre sa boutique « pour rassembler l’artisanat Hmong [et] devenir un libre-service de l’insecte ». Les habiles Saramaka du village sont les premiers à ramener des mygales. Les jeunes Hmongs s’y mettent aussi. Au gré de rencontres, Philippe Soler s’intéresse de plus en plus aux mygales, terreurs fantasmées des habitants du littoral et des voyageurs.

à la fin des années 80, le passionné propose aux visiteurs de prendre dans leurs mains les matoutous, « cela [les] fascinait car ils s’imaginaient qu’elles étaient toutes dangereuses voire mortelles » (…).

En Guyane, nombreux sont les collectionneurs d’insectes amateurs, éclairés ou scientifiques mais aucun n’accepte de dévoiler ses trésors entomologiques au grand public. Pour aller à contre-courant de cette habitude, pour contribuer à une meilleure connaissance de l’environnement de cette Guyane si décriée et pour contribuer à l’essor touristique et économique de mon village », il crée son association. Elle devient une étape obligatoire avant ou après les nems du dimanche. 5 000 visiteurs se succèdent la première année, pour se stabiliser aujourd’hui autour des 12 000 visiteurs par an. Un boulot à temps plein pour les araignées ! Philippe Soler se décrit comme un « éducateur à l’environnement » parce que, dit-il « mes objectifs sont de démystifier cette Guyane et d’informer et mettre en garde contre certains abus en matière de “prélèvement” notamment celui de mygales de plus en plus petites et jeunes ». Des idées parmi d’autres pour protéger les populations : « commercialiser les mues de mygales plutôt que leurs cadavres » ou encore « réglementer le prélèvement ou l’exportation de ces bêtes par arrêté préfectoral comme l’ont fait les Antillais pour la matoutou falaise, considérée comme l’une des plus belles mygales au monde ».