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Zika : le petit dernier turbulent
de la famille arbovirus

Il y a un an, Zika, un nouvel arbovirus, transmis par les arthropodes, commençait à faire parler de lui. À l’époque, ce cousin de la dengue et de la fièvre jaune inquiétait peu. Une petite fièvre, des boutons, des courbatures, les yeux rouges, voire pas de symptômes du tout dans le cas d’une infection asymptomatique. Depuis il a bien grandi et il n’est pas si gentil que ça !

Des débuts plutôt discrets
Il est initialement découvert à la fin des années 1940 dans la forêt Zika, en Ouganda. Jusqu’en 2007, moins de 10 cas ont été identifiés chez l’Homme. Les moustiques Aedes, les mêmes qui transmettent la dengue et le chikungunya, étaient alors connus pour être son meilleur vecteur. En 2007, quelques centaines de cas bénins sont décrits sur la petite île de Yap dans l’océan Pacifique. Puis, plus rien. En 2013, le virus s’attaque à la Polynésie française. Le gentil petit cousin ne serait-il pas plus méchant que prévu ? En effet, quelques cas de syndrome de Guillain-Barré, une atteinte des nerfs périphériques entraînant une paralysie progressive des pieds jusqu’aux muscles de la cage thoracique, sont rapportés. En six mois, l’épidémie s’éteint. Nouveau silence radio pendant un an.

L’ennemi public numéro 1
Fin mai 2015, alerte sanitaire, Zika aurait touché plusieurs milliers de cas dans le Nordeste brésilien. L’épidémie s’étend alors en quelques mois à pratiquement toute l’Amérique latine. L’alerte est lancée en octobre 2015. Une recrudescence de malformations neurologiques graves chez des nouveau-nés, avec des périmètres crâniens plus petits que la normale est constatée, la microcéphalie. Les études confirment un lien avec Zika. Le virus est retrouvé dans l’analyse de liquide amniotique de certaines femmes dont les fœtus présentent ces anomalies et dans les tissus cérébraux d’enfants mort-nés avec malformations. Rétrospectivement, les Polynésiens découvrent eux aussi une augmentation de ces anomalies chez les nouveau-nés. L’infection par Zika au cours de la grossesse, surtout au premier trimestre, est donc à l’origine de ces malformations fœtales dans 1 à 10 % des cas. C’est la panique ! L’Organisation mondiale de la santé tire la sonnette d’alarme et fait de l’épidémie de Zika un problème mondial de santé publique en janvier 2016. Partout on entend : «Femmes enceintes, évitez l’Amérique latine ; femmes latino-caribéennes, fuyez ces lieux maudits ». Un mode de transmission inédit chez les arbovirus.
Une nouvelle surprenante vient compléter le capharnaüm ambiant. Le petit cousin aurait la possibilité de se transmettre par relations sexuelles, mode de transmission jusqu’alors jamais décrit dans cette famille de virus. En juillet 2016, Rihanna refuse même d’aller faire un concert en Colombie, de peur de tomber malade. Mais par quel biais craignait-elle de l’attraper ? Pour couronner le tout, non seulement le virus semble rester contagieux plusieurs mois dans le sperme, mais on peut être porteur sans avoir eu de symptômes évocateurs ! Les femmes doivent-elles éviter de tomber enceintes ? Et si cela arrive, il faut alors se méfier des moustiques, mais aussi de son partenaire ! En cas d’infection au cours de la grossesse, aucun test ne permet de prédire une microcéphalie et on peut seulement multiplier les échographies pour dépister l’apparition d’anomalies et le cas échéant proposer une interruption de grossesse.

Zika, le favori des JO de Rio

podium rio

à l’approche des jeux Olympiques de Rio de l’été 2016, la tension monte. De nombreux athlètes veulent jeter

l’éponge. Peur d’attraper le virus ? De développer la forme neurologique, pourtant très rare ? De rester fidèle à la

capote, même avec son partenaire de confiance ? Zika semble être en train de gagner ces JO par forfait.
Il y a encore beaucoup d’inconnues pour ce virus et la recherche n’en est qu’à ces balbutiements concernant la possibilité d’un vaccin ou d’un traitement. Un voyou, le petit cousin !
Texte de Loïc Epelboin, médecin infectiologue, centre hospitalier de Cayenne
Illustrations de Max Sibille