quelque 43 millions d’hectares de forêts ont disparu entre 2004 et 2017 sur les 24 « fronts » principaux de déforestation à travers le monde, alerte le WWF dans un rapport publié le 13 janvier dernier.
L’Amérique du Sud est particulièrement touchée. La région du Cerrado, au Brésil, a ainsi perdu 3 millions d’hectares sur cette période et plus de 30 % de sa surface depuis l’an 2000 ! En outre, 45 % des surfaces forestières restantes sur ces 24 fronts sont dégradés ou fragmentés et donc plus vulnérables aux feux et au changement climatique en cours. Sont pointés du doigt : l’agriculture « commerciale » et l’élevage intensif, qui conduisent à défricher massivement (soja et bœuf dans le Cerrado par exemple), l’exploitation minière (84 % de la déforestation au Guyana) ou encore les infrastructures routières, l’industrie forestière…
mesures sanitaires et abattage illégal des arbres.
Comme le notent les auteurs du rapport, « cette dégradation met à mal la capacité des forêts à fournir des services écosystémiques (épuration et rétention de l’eau, captation de carbone, production de nourriture et de matériaux, etc.) indispensables à l’homme ». La fragilisation des écosystèmes forestiers favorise également les contacts entre espèces sauvages et l’homme et donc l’émergence de maladies d’origine animale (zoonoses) comme la Covid-19. Plus surprenant, selon une autre étude internationale publiée récemment dans la revue Perspectives in Ecology and Conservation, la pandémie actuelle et ses conséquences socio-économiques ont, à l’inverse, accéléré la dégradation des forêts tropicales dans de nombreuses régions. Ce qui, in fine, pourrait accroître encore les risques d’émergence de nouvelles zoonoses. Pedro Brancalion, de l’Université de São Paulo (Brésil) et ses collaborateurs ont remarqué qu’en 2020, dans le mois qui a suivi la mise en œuvre des mesures sanitaires, la déforestation a augmenté de 63 % en Amérique, de 136 % en Afrique et de 63 % en Asie-Pacifique. La pandémie n’est évidemment pas seule en cause. Mais selon les chercheurs, elle y participe grandement. Le confinement imposé dans de nombreux pays s’est traduit par un relâchement dans la surveillance et la gestion des forêts. Et qui dit moins de police et d’écogardes, dit plus d’abattage illégal des arbres. À plus long terme, la crise économique pourrait encore accroître la dépendance de nombreux pays tropicaux vis-à-vis de leurs exportations de produits agricoles de base. Et donc le processus de déforestation et de dégradation des forêts, renforçant ainsi les risques d’émergence de zoonoses.

(https://www.wwf.fr/ ; P. Brancalion et al., Perspectives in Ecology and Conservation 18(4), 243-246, 2020)

Photo de Marin Talbot