La police fédérale brésilienne et le gendarme de l’environnement Ibama ont démantelé une filière d’extraction illégale d’or et de diamants au sein de la réserve Yanomami dans le Roraima, à la frontière vénézuélienne. Ces deux dernières années, la fraude aurait généré 1 milliard de reais, soit quelque 300 millions d’euros. Extraits de l’article du site Amazônia Real* (07/05/15).

Début mai, des fonctionnaires, des opérateurs miniers, des bijoutiers, des pilotes d’avion et des commanditaires de Boa Vista, Manaus, Belém, Porto Velho et São Paulo sont tombés dans les mailles du filet de la police fédérale (PF) brésilienne au cours d’une opération menée conjointement avec l’Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles (Ibama). Parmi les nombreux suspects, deux responsables de la Funai, organisme public chargé de la protection et de la défense des peuples indigènes.

À Manaus (Amazonas), la PF a placé deux individus en garde à vue et émis un mandat de perquisition et de saisie. À Boa Vista (Roraima) cinq suspects ont été placé en garde à vue, dont deux responsables de la Funai. La justice brésilienne a également déployé 150 policiers fédéraux au sein de la réserve Yanomami pour recueillir les preuves et fermer les mines. À ce jour, aucun mandat de prison préventive n’a été émis mais les autorités brésiliennes ont d’ores et déjà lancé 313 poursuites judiciaires pour association de malfaiteurs, extraction illégale de ressources naturelles, utilisation inappropriée du mercure, usurpation du patrimoine de l’Union, recel, corruption, violation du secret professionnel, contrebande, blanchiment d’argent et exercice illégal de la profession de banquier.

À Boa Vista, 26 bijouteries et comptoirs d’or ont été fermés temporairement. Ces points de vente réceptionnaient l’or et les pierres précieuses avant de les revendre à São Paulo. Selon la PF, les trafiquants commerçaient aussi d’autres minéraux, comme la tantalite, minéral indispensable à la fabrication de composants électroniques équipant les produits high-tech (ordinateurs, smartphones, tablettes…) Le réseau assurait toute la logistique au sein de la réserve, avec notamment la mise à disposition de dragues évaluées à 1 million de reais chacune (300 000 euros) et aussi de barges estimées à 100 000 reais l’unité (30 000 euros). Le réseau écoulait chaque mois environ 160 kg d’or, représentant pour l’État brésilien un manque à gagner de 17 millions de reais, soit 5 millions d’euros.

Les gros bonnets sont tombés
Il reviendra à Ibama d’évaluer le préjudice environnemental sur le territoire Yanomami, qui représente une superficie de 96 000 km2 et abrite près de 20 000 Amérindiens, selon le ministère de la Santé (2011). Depuis de nombreuses années, les leaders Yanomami n’ont pas cessé de dénoncer l’orpaillage illégal sur leurs terres. Dans les années 80 et 90, une centaine de pistes d’atterrissage clandestines avaient été construites au sein de la réserve, selon l’Association Hutukara. À cette époque l’activité minière mobilisait entre 30 et 40 mille hommes. Par la suite, le gouvernement brésilien avait réussi à les expulser, mais l’activité avait persisté à petite échelle.
Dário Yanomami, directeur de l’association Hutukara n’a pas caché sa satisfaction à Amazônia Real : « Cette fois, les gros bonnets sont tombés. Nous avions déjà mentionné leur implication aux autorités brésiliennes. L’exploitation minière détruit les rivières et les forêts, principalement dans les régions de Paapiú et Homoxi, où la pollution est conséquente et les populations indigènes touchées par de graves maladies. On ignore cependant la quantité de mercure rejetée dans nos rivières et l’ampleur des dégâts sur nos terres. »

* Créé en octobre 2013 à Manaus, Amazônia Real est un site d’information en ligne indépendant et à but non-lucratif. Il s’intéresse aux territoires et populations d’Amazonie, et privilégient les sujets souvent ignorés par la presse traditionnelle.

Titre original : « PF desarticula organização criminosa de extração de ouro na reserva Yanomami » (Kátia Brasil)

http://amazoniareal.com.br/pf-desarticula-organizacao-criminosa-de-extracao-de-ouro-na-reserva-yanomami/

http://www.hutukara.org/

Photo en haut : lever de soleil sur le mont Roraima, frontière entre le Brésil, le Venezuela et le Guyana.(P-O Jay / Atelier Aymara). Au fond du panorama, la crête où débute le territoire du Brésil et l’Etat du Roraima. Extrait de l’article VENEZUELA, vers les hauts plateaux des Guyanes

Ci-dessous : le territoire Yanomami au Brésil (Mapa da Õkrãpomaɨ – Expedição Yanomami (Ninja/ISA/Hutukara))

mapa-roraima

 

 

Article précédent : « Roraima, orpaillage & charge des députés contre le gouvernement » : http://www.une-saison-en-guyane.com/breves/journal-des-guyanes/roraima-orpaillage-charge-de-deputes-contre-le-gouvernement/