En manque de liquidités, le Vénézuéla compte sur ses richesses minières pour sortir de la crise. Au risque de mettre en péril les écosystèmes du bassin de l’Orénoque, selon les experts et écologistes. El Tiempo, 18/09/16, extraits.

Début septembre, le Vénézuéla a commencé la phase d’exploration du méga-projet minier dit Arco Minero. Situé le long du bassin de l’Orénoque, il recouvre 12% du territoire national, soit la taille de la Bulgarie. Défini entre 2010 et 2011 au temps de Chávez dans le cadre d’ une «exploitation minière durable», le projet garantit «la réparation des préjudices environnementaux occasionnés par l’activité». En partenariat avec l’État, 150 entreprises de 35 pays vont y exploiter les réserves d’or, de diamants, coltan, fer et bauxite dans des mines à ciel ouvert. Mais le projet est vivement critiqué. Selon les experts, analystes et écologistes, la forêt sera la victime collatérale de ce qui s’apparente à une «guerre économique
Suite à la chute vertigineuse des cours du pétrole, la crise financière a conduit le gouvernement vénézuélien à changer de stratégie. En août dernier le président Nicolás Maduro a signé des mémorandums d’accord avec des sociétés étrangères pour un total de 10 milliards U$. Des décisions ont été prises sans consulter l’Assemblée nationale, en violation de l’article 150 de la Constitution vénézuélienne. « [L'exécutif ] relocalise des sociétés et de cette façon apure ses contentieux en réaffectant des concessions illégalement. El Arco Minero représente un suicide environnemental caractérisé par le passage d’une économie de rente pétrolière à une économie de rente minière », déclare le professeur Alexander Luzardo Nava, ancien président de la commission de l’environnement au Sénat vénézuélien et co-éditeur des dispositions environnementales inscrites dans la Constitution de 1999.
Un des aspects les plus controversés concerne des concessions attribuées au géant minier Gold Reserve dont le permis d’exploitation dans l’État de Bolívar fut retiré en 2009 : la mine de Las Brisas et la nouvelle mine de Las Cristinas lui ont été attribuées. Et l’État vénézuélien a également accepté de lui verser une indemnité de 769,7 millions U$ de compensation, soit plus du double de ce qu’il avait investi jusqu’à alors. En outre, le pays a convenu d’acquérir les données de la société pour 240 millions U$.

À genoux devant les sociétés transnationales
Pastora Medina, vice-présidente du Mouvement écologique du Vénézuéla, reproche au gouvernement d’être «à genoux» devant les sociétés transnationales comme Gold Reserve. Pour certains analystes, ces dépenses grèvent les finances du pays, tandis que les accords n’apportent pas franchement d’argent frais à l’État.
L‘exécutif fait miroiter à l’opinion publique l’existence de grands gisements, mais selon Luzardo, el Arco Minero est une chimère : « Les richesses annoncées ne sont pas avérées. Non seulement le projet est un écocide, mais il n’est pas viable économiquement ». Et d’ajouter : « A chaque fois que les cours du pétrole chutent, on lance un plan qui met en danger les réserves d’eau du pays. » L’exploitation minière a recours à des produits chimiques très toxiques et dangereux qui fragilisent les écosystèmes. « Le mercure et le cyanure sont inhérents au secteur minier. Il est totalement irresponsable de parler d’une exploitation écologique. Cela n’existe tout simplement pas. Si la population n’est pas alertée immédiatement, il y aura une cyanuration du bassin de l’Orénoque. Sans préservation de la biodiversité, la reprise économique est intenable », conclut-il.

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Titre original : Arco Minero: víctima colateral de la “guerra económica”

http://eltiempo.com.ve/venezuela/situacion/arco-minero-victima-colateral-de-la-guerra-economica/229207

Photo : Ciudad Bolivar, sur les rives de l’Orénoque. Photo P-O Jay – Atelier Aymara