Marie-Françoise Prévost (dite Fanchon) est décédée ce 31 janvier. Figure emblématique de la botanique tropicale, Fanchon a collecté et identifié des milliers d’espèces de plantes de Guyane, et nombre d’entre elles portent aujourd’hui son nom.  Ses collègues et ses proches racontent  qu’elle a fait de la botanique jusqu’au dernier moment et qu’elle déterminait encore des échantillons quelques minutes avant de tirer sa révérence. 

Voici son portrait écrit par Daniel Sabatier dans une lettre d’information du laboratoire AMAP en 2006.

Marie-Françoise Prévost (alias «Fanchon») a commencé sa carrière de botaniste à l’ORSTOM (actuel IRD) comme élève chercheur au début des années 60.

Rapidement affectée au centre de recherche d’Adiopodoumé en Côte d’Ivoire, où elle travaillera dix ans, elle met en œuvre les enseignements de ses maîtres dans le contexte porteur de l’ar- chitecture des plantes que Francis Hallé fait naître en ces lieux. Elle apporte à cette démarche nouvelle de solides appuis, définit la notion d’article (aussi appelé « module » en architecture vé- gétale), explore la ramification sympodiale et décrit de drôles de manières de construire un arbre : le « modèle architectural de Prévost » qu’Hallé et Oldeman lui dédient.

Après un court séjour au Laboratoire de Botanique Tropicale (Institut de Botanique de Montpellier), c’est la découverte d’un « nouveau monde » végétal et humain, bien moins exploré que celui où elle fit ses premières armes : la Guyane, et en perspective l’Amazonie. C’est d’abord la relation étroite, nourricière autant que spirituelle, que les hommes entretiennent avec le végétal qui la motive. Sur ce chemin, elle accompagne les ethno-anthropo- logues Pierre et Françoise Grenand. Elle retrouve avec les « noirs marrons » une partie de l’Afrique, se passionne pour l’usage des plantes chez les amérindiens, s’enthousiasme des jardins créoles. Dans cette perspective, elle appuie quantité de DEA et Thèses et collabore à de nombreux travaux qui, des plantes alimentaires ou tinctoriales à celles dont les principes soignent ou nourrissent la spiritualité, en passant par celles qui créent le cadre de vie (orne- mentales), gravent la mémoire d’un monde en mutation. Dans cet esprit, elle  collabore à l’ouvrage « Pharmacopées Traditionnelles en Guyane » dont l’iconographie témoigne de son talent pour saisir et montrer les plantes.

Sa deuxième grande motivation est de comprendre les plantes dans leur milieu « naturel » ou anthropisé : dynamique et com- pétition des héliophiles ; banque de graines du sol ; graines et dissémination … Dans cet esprit, dès la fin des années 80, elle réalise avec Daniel Sabatier les premiers inventaires botaniques quantitatifs d’arbres forestiers de Guyane qui initient une longue et fructueuse collaboration sur l’étude de l’organisation des peu- plements forestiers, récemment couronnée par la participation à une synthèse amazonienne parue dans la revue Nature.

Comme en témoignent les 8 espèces végétales qui lui sont dé- diées et portent son nom sa carrière s’est construite autour d’un esprit vif et d’un sens aigu de l’observation, qu’elle a toujours mis au service de la connaissance du monde végétal et d’un partage généreux auprès de très nombreux botanistes qu’elle a très humblement contribué à former. Aujourd’hui en « retraite » et bien que le terme même l’horrifie, elle poursuit bénévolement ses travaux en Guyane auprès de l’herbier et de ses collègues d’Amap et continue ainsi à collaborer à la connaissance de la végétation guyanaise avec tout le talent qui la caractérise et lui est unanimement reconnu.

Fanchon

Modèle architectural de Prévost

Fanchon

Passiflora fanchonae Feuillet (Passifloraceae)