Les tensions liées à la terre sont extrêmement vives en Amazonie brésilienne. À Anapu, municipalité située dans le Pará, une communauté agricole est la dernière cible des grileiros [voleurs de terres] de la région.

En février 2005, la missionnaire américaine Dorothy Stang était assassinée brutalement à Anapu. Malgré le retentissement international du crime, l’accaparement des terres, le déboisement illégal et les menaces de mort à l’encontre des petits paysans n’ont pas cessé. Le 15 novembre dernier, un groupe armé d’environ 200 hommes a pris d’assaut le domaine agricole du Projet de développement durable [PDS] Virola-Jatobá, héritage de Dorothy Stang. Grileiros et bûcherons acolytes ont ensuite délimité des parcelles de 100 à 200 hectares qu’ils proposent à la vente à des exploitants agricoles complices. Les petits producteurs ont alerté l’Institut national de colonisation et de réforme agraire (Incra) et la police fédérale (PF) pour engager une procédure d’expulsion. En réponse, les grileiros menacent de mettre le feu à l’entrepôt de la coopérative où sont stockés matériel et bois écocertifié prêt à la vente. Ces hommes seraient tous originaires d’Anapu et d’une municipalité plus au sud.

La situation est tendue. «La zone occupée [environ 22 000 ha] est remplie de grileiros. C’est sur ces parcelles que nous devrions travailler l’année prochaine. Il faudrait vraiment déloger ces gens parce que nous craignons le pire», confesse un membre de la communauté. 
Roberto et Noemi Porro, respectivement chercheurs à l’Embrapa [1] et à l’Université fédérale du Pará, travaillent avec les familles de Virola-Jatobá. «Si ces hommes s’en prennent à l’entrepôt avec ses 6000 m3 de bois, le préjudice s’élèverait à plus de 1, 5 million de reais [2]», préviennent-ils. «Le climat d’insécurité s’est profondément dégradé ces derniers mois avec la présence des grileiros et des bûcherons clandestins». Et de poursuivre : «C’est le résultat de pressions de plus en plus fortes exercées par des secteurs opposés à la politique foncière et environnementale en Amazonie, et du mauvais fonctionnement de l’Incra à Anapu.»

Face aux faux titres de propriété, au déboisement clandestin et à l’installation irrégulière sur leurs parcelles, les petits producteurs de Virola-Jatobá perdent patience. En deux ans et demi, ils n’ont cessé d’alerter les organismes compétents. 27 fois au total, sans résultat. Ce qui a eu pour effet de renforcer les actes illégaux.

Dorothy Stang

Source: Amazôniareal, 22/11/17.