La Crique, un quartier de Cayenne aujourd’hui très métissé, a longtemps été le point d’arrivée de la communauté dominicaine, présente en Guyane depuis un demi-siècle. Quelques familles qui revendiquent fièrement leur culture nous ont ouvert leurs portes.

Sur la terrasse d’un snack du Village chinois, Inès et Melania sirotent une bière. « C’est vendredi », semblent-elles s’excuser dans un sourire, avant d’entamer leur fricassée de bœuf et leurs pois d’angole. Chaque bouchée est interrompue par un clin d’œil ou un petit mot en espagnol lancés à des connaissances qui passent sur le trottoir. « Oui, on connaît du monde ici. » Inès Moronta est présidente de l’Association franco-dominicaine de Guyane (AFDG) et Melania Matos Alcantara en est la médiatrice sociale. Autour d’elles, ça parle français, créole, anglais, portugais… Le Village chinois a perdu sa dominance dominicaine il y a longtemps, même si leurs commerces et bars sont encore présents. « Les gens quittent le quartier quand ils ont des enfants, mais ils y reviennent pour faire la fête », note Melania. Dans les bars pour y danser ou sur le trottoir pour y discuter.
C’est dans les années 1970 que la première vague dominicaine a déferlé sur Cayenne. La mère d’Inès en faisait partie. « Elle a été la première dominicaine à passer son permis. Le succès attire le succès. Avant, les Dominicains venaient à Chicago parce que la famille était installée là et que ce n’était pas cher. Aujourd’hui, pas forcément. » À l’époque, le quartier était calme et l’entraide était reine. Les rues étaient en latérite et les enfants jouaient avec des balles de chiffons. De nos jours, Chicago a la réputation d’un coupe-gorge, mais serait moins dangereux que Saint-Domingue, où l’on pourrait se faire égorger à chaque coin de rue. « La Guyane est aussi dangereuse que n’importe où, nuance Inès. L’immigration est surtout économique, en vérité. »

La Crique, un quartier multiethnique
Suite réservée aux abonnés…